Chapitre I - Prélude à la confusion.Noir il était. Le boxer dans lequel Beccaline n'arrivait pas à se sentir réellement à l'aise. Les culottes semblaient si confortables à coté de ces horreurs qu'elle ne pouvait s’empêcher de détailler chaque parcelle de cet atroce bout de tissus légèrement élastique, au travers d'un miroir aux dimensions magistrales. Peut-être aurait-elle à patienter plusieurs mois avant de pouvoir un jour retrouver la douceur de ses petites culottes blanches.
Que de tristes pensées. Son corps délicatement frêle, sa peau pâlement veloutée, ses jambes arachnéennes et filiformes, ses bras gracieusement longs, sa fine et délicieuse poitrine, son nouveau sous vêtement sombre : chaque détail de cette apparence semblait être un don des dieux qui lui permettrait d'accomplir ses prochains exploits en ce bas monde. Elle souriait discrètement face à cette montée de Narcissisme et de douce Folie qu'elle ne pouvait contenir, et continuait lentement à couvrir son corps de poupée, des linges qui en ferait le garçon le plus féminin du monde : Son double masculin prenait peu à peu forme.
En ajustant le col d'une chemise trop large pour elle, Beccaline ne cessait de se complimenter sur ses capacités à innover et à aller toujours plus loin dans sa réussite. Son blaser noir, où de fines rayures blanches à peine perceptibles caressaient la noblesse de ses tissus, n'échappa à la délicatesse avec lesquels ses doigts s'empressèrent de le saisir pour recouvrir ses petites épaules .
Chapitre II - Retour aux sources.Pour penser ainsi à se déguiser en garçon, les motivations doivent être réellement bonnes.
En remontant le temps, en visitant les 19 années précédant cette importante décision, la réponse se présentera certainement d'elle même.
Beccaline London Woodsen, connue et reconnue pour trois grandes caractéristiques : Ses capacités intellectuelles, son apparence particulière et son prénom que personne n'avait jamais réussi à écrire correctement.
M. Woodsen, son père, l'avait bien compris, qu'en épousant cette femme, sa descendance ne serait que l'expression de leurs gènes les plus remarquables. Depuis toute petite, ce n'était que grâce à cela que le monde s’intéressait à elle. Les parents de ses petits amis la reconnaissaient comme " Brillante " et les amis en question y voyaient un modèle de conduite et de travail qu'ils se contentaient de jalouser. Le revers de la médaille d'Or de la réussite Scolaire était sans doute la malédiction de l'échec Amoureux. Le problème venait juste du fait que porter les cheveux courts et être la seule adolescente à ne point avoir de seins bien rebondis à l'âge de 14ans faisait d'elle : Un garçon. Les moqueries proliféraient sur son dos et les questions embarrassantes fusaient lorsqu'elle était face aux haineux de son espèce. Le collège n'aura donc pas été une période facile pour elle, et quelques sequelles sont encore décelables lorsqu'elle vous parle de son passé. Elle avait beau avoir le minimum pour être heureuse : une famille aimante et présente, quelques bons amis et de très bonnes notes ... ne pas être considérer comme les autres filles faisait d'elle une adolescente bien trop malheureuse.
Chapitre 3 - Contrôlez votre destin, là est la clé de votre réussite.Reconsidérer sa façon d'être, se poser des questions sur soi-même et sur les raisons de sa présence en cette Terre sont des choses si ennuyeuses qu'une partie de la jeunesse préfère s'inventer une réponse, plutot que d'en chercher une convenablement. Car oui, la souffrance était une chose. Ne pas réagir, attendre qu'elle s'éteigne d'elle-même en était une autre. Il fallait changer cela et montrer au monde que sous-estimer les androgynes comme Becca était plutot mauvais pour leur santé.
Beccaline chercha donc à devenir ce genre de fille : qui ne se laissait pas faire et qui imposait sa manière d'être. Chose qu'elle n'avait jusque là jamais osé faire, chose qui désormais lui paressait le meilleur moyen d' avoir une vie normale. Le Charisme, l'Assurance, l'Humour, l'Auto-dérision : tout le monde pouvait les apprécier à leur juste valeur et voir en " l'hermaphrodite " que semblait être Beccaline, quelqu'un de passionnant et d'unique. Sa patience avait donc fini par payer ! Et si l'Amour, les premiers baisers d'adolescents en fleur et autres perles de la puberté lui avaient échappés pendant 16ans, toutes ces belles choses lui étaient désormais offertes sur plateaux d'argent, à déguster avec couverts sertis de diamants. Car en effet, il n y a que les jeunes hommes et jeunes femmes de ces ages là qui commencent à se poser des questions stupides sur leurs orientations sexuelles, et qui commencent donc à voir en Beccaline, une manière de satisfaire chacun de leurs penchants.
Un retournement de situation dont elle était plutôt fière et dont elle profita, sur tout les plans. Excellant comme à son habitude dans sa filiaire scientifique, étant accompagnée des plus jolies partenaires en travaux pratiques, éveillant des soupçons amusants chez certaines personnes, laissant planer le doute chez d'autres. Jouer ainsi pouvait être perturbant et lassant, seulement, Becca s'en délectait et ajustait toujours les manches de son blaser BF avec une précision qui savait rendre folles quelques unes de ses fréquentations. Une poitrine, ainsi que des hanches firent leur apparition bien sûr, ce qui rendit fous l'autre partie de ses fréquentations.
Chapitre 4 - Les idées débiles sont souvent les meilleurs.Vint donc le jour où "Passer aux Etudes supérieures arriva". Ayant obtenu les résultats attendus, Beccaline se dirigea vers une école réputée pour former des ingénieurs complets et demandés. Seulement, malgré ses capacités, le destin en décida autrement. Le niveau était haut, suffisamment pour que des élèves bien plus douées qu'elle ne soient prises avant. Devant la limite de places disponibles, c'est un " COMPLET " qui s'afficha pour le département féminin de l'école pour laquelle elle avait tant travaillé.
6eme sur la Liste d'attente. Voila où elle se retrouvait désormais. Il n'était même pas possible pour elle d'espérer être prise étant donné qu'aucune des reçues ne se désisteraient, c'était évident. Alors qu'elle était abasourdie devant la liste des résultats, Colère ne tarda pas à la gagner. Elle qui pensait être invincible se retrouvait désormais éloignée de l'un de ses objectifs les plus grands. Becca cheminait dans le hall de cette école, attendant qu'on lui remette la procédure à suivre pour les élèves en liste d'attente. A ce qu'il paraissait, chaque année, quelques personnes mourraient ou disparaissaient avant la rentrée des classes, ce qui libéraient des places.
- " J'APPELLE LE CANDIDAT N°1548 ... BECCALINE WOODSEN, C'EST POUR LES ELEVES NON RECUS QUI VEULENT DES INFORMATIONS SUR L'ATTENTE" appela un vieil homme à l'accueil
Lui ? Remuer le couteau dans la plaie ? Nooon ...
- " C'est moi " dit-elle d'une voix sombre, en s'installant en face de lui.
Elle n'écoutait pas réellement ce qu'il lui expliquait et se contentait d'hocher la tête aux documents qu'il lui indiquait. Seule une phrase retint son attention.
- " Oh, par contre, c'est étrange, apparemment, nous avions mis la mauvaise adresse dans nos registres, nous pouvons corriger cela. Vous savez, les erreurs arrivent souvent mon garçon."
- " Ouais ... " se contenta-t-elle de bougonner.
- " Oh, et je crois également qu'ils ont fait une erreur sur votre sexe ! C'est stupide ! C'est vrai que vous êtes plutôt fin , mais de là à vous traiter de fille, c'est dommage ! Nous allons corriger cela également. "Beccaline regarda un instant la manière dont elle était habillée, et en effet, ce large pull de geek était plutôt trompeur quant à la présence potentielle d'une paire de seins.
" Je vais donc vous mettre dans la file d'attente des garçons, on dit qu'ils sont moins nombreux que les filles, vous serez peut etre mieux placé ! "
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Vous me suivez ?
Ce petit changement auquel Beccaline ne réagit qu'en adressant un sourire narquois au vieil homme lui permit de revoir sa dépression à la baisse. En effet, la concurrence chez les garçons était moins rude. Elle se contenta de taper un beau scandale quant à cette erreur et le classement fut revu dans les jours qui suivirent ce petit numéro. Evidemment, cette supercherie lui permit d'être prise, et malgré le fait qu'un F soit affiché partout, il lui suffisait de les regarder dans les yeux et de se plaindre d'une forme de discrimination complètement inventée pour que son dossier soit reconsidéré.
Finalement, grâce à de multiples magouilles et grâce à la complicité de quelques génies de la falsification, c'est un ADMIS , qu'elle portait désormais. La mission n'était pas très compliquée : se procurer de vrais faux papiers avec un sexe " M " , payer très cher si il le fallait et éviter les aéroports pour se rendre dans l'état où se trouvait sa nouvelle école. Après tout, se faire passer pour un garçon ne devait pas être si difficile pour quelqu'un qui avait déjà les cheveux courts : elle avait étudié avec soin les brochures et il était possible de se doucher seul, d'avoir sa chambre individuel et de jouer aux parfaits hétéros pour éviter tout contact avec ses futurs camarades masculins.
L'aide pour traverser le pays fut donc proposée par l'un de ses amis qui avait besoin d'un service tout aussi illégal en retour. Parce qu'avec une carte d'identité falsifiée, bien que celle-ci soit d'une excellente qualité, il était préférable de faire profil bas. Le programme consistait donc à un très long voyage en voiture : cela s'annonçait plutôt fou et amusant, et le but ultime était la chose que Becca attendait le plus.
Le problème voyez-vous, c'est que
COMPTER SUR LES AUTRES a toujours été une erreur fatale. Elle qui avait prit pour habitude de se mefier des humains, elle aurait du s'y attendre ..
Ce n'est pas Beccaline Woodsen qui eut des problèmes pour avoir de faux papiers, mais son cher compagnon pour avoir fuit la police. CAR OUI, lorsque vous demandez à vos fréquentations les plus louches de vous aider, vous apprenez, au détour d'une petite frontière qu'il aurait été plus judicieux de ne rien leur demander. Les ennuis commencèrent donc lorsque le véhicule perdit de sa fougue. Les trajectoires commençaient à se faire moins précises et un arrêt temporaire s'imposa.
- On a du abuser, mon pneu arrière droit est crevé. Annonça le jeune homme à Becca.
- On ? Hmm ... t'as pas de pneu de rechange ?- Mais si , pour qui tu me prends? Le truc c'est que je sais pas l'installer, ça m'est jamais arrivé ce genre de truc, se contenta-t-il de répondre.
Au final, 6 longues heures passèrent alors que notre binôme était toujours dans cette même situation : Arrêtés sur les bandes d'urgence. Après avoir tenté de changer le pneu eux-même ( sans espoir ), après avoir tenté d’arrêter les autres voitures en leur faisant des signes ( sans succès ) , c'est une voiture aux couleurs bien connues qui vint leur rendre visite. " La Police ? " Les agents les interpellèrent en leur demandant ce qui n'allait pas. Le conducteur expliqua bien calmement la situation et une aide fut gracieusement proposée. Seulement voila, les choses auraient pu se passer dans les règles si Beccaline n'avait pas cherché à être aimable :
- Regardez donc dans le coffre, vous pourrez ... nettoyer vos mains convenablement, nous avons tout ce qu'il faut." NOON, PAS LE COFFRE " aurait été une phrase trop louche à crier, le conducteur laissa donc les agents faire. C'est un petit détail qui précipita la situation : Quelques grammes d'héroïne pure cachés prêt des mouchoirs. Vous devez vous dire que cela est réellement stupide et qu'il aurait pu s'abstenir d'en transporter, seulement l’héroïne, c'est comme le chocolat : A force d'en consommer on ne peux réellement vivre sans. Ils furent embarquer tout deux sans attendre. Le temps ne passa pas bien vite , et puis, pas besoin de tant de temps que ça pour se rendre compte que le visage du jeune homme en question était "connu". Que pouvait bien contenir son casier judiciaire ? " Trafic de drogue, Vol. " Vol .. de voiture ?
COMME C'EST SURPRENANT !
Le stress et la tension étaient à leur maximum pour notre Beccaline, à qui ces choses là semblaient bien trop lointaines pour être réelles. Son interrogatoire fut certainement le moment le plus horrible de sa vie. Elle ne pouvait pas "faire semblant" , elle ne pouvait pas "faire les yeux doux". Il fallait qu'elle agisse le plus sobrement possible et qu'elle tente de prouver son innocence. Sa plus grande peur était certainement les faux papiers qu'elle transportait : encore fois, il faudrait réellement les passer aux rayons X pour constater qu'ils n'étaient pas d'origine, mais elle ne pouvait s’empêcher d'avoir peur.
Après une nuit au poste, elle fut finalement relâchée. Son collègue et elle s'étaient démenés pour leur expliquer qu'il était seul sur ce coup là et compte tenu de la virginité de son casier et de l'absence de preuves tangibles, la liberté s'offrait désormais à elle. Beccaline ne demanda rien de plus que de partir, assurant que le trou perdu où ils se trouvaient était la destination désirée.
Chapitre 5 - Et maintenant ?Le regard au loin, le sourire aux lèvres, c'est avec un humour malsain que semblait se présenter la situation. Beccaline, assise sur sa valise, un rubik's cube à la main était fière d'avoir prit de l'avance pour son voyage. Après tout , elle ne resterait pas bien longtemps dans cet hôtel et pourrait aussitôt repartir quand la situation s'arrangerait :
« Le mauvais sort ne m'aura pas, j'ai pris de l'avance sur lui ». Elle avait fait plusieurs kilomètres en stop, étant donné que la voiture avait été confisquée, et une dame plutôt sympathique avait accepté de la conduire jusqu'au prochain hôtel " en attendant de trouver une solution ".
Tout en décalant ses cubes colorés avec rage, elle tentait d'établir
CALMEMENT la liste de ce qui risquait de lui poser problème dans l'immédiat :
« Voyons voir ...
- Je n'ai que des vêtements masculins avec moi.
- Je n'ai aucun moyen de quitter les lieux parce que je n'ai pas de voiture non plus.
- Si je rencontre des forces de l'ordre ou la police scientifique, ils vont peut-être s’apercevoir des différences de composition pour les plastiques utilisés sur ma carte ... et je vais devoir aller en prison.
- Je ne peux appeler personne parce que je ne connais personne d'assez fou pour venir me chercher.
- Mes parents ne sont pas au courant de ma supercherie et me croient à l'aeroport.
Résultat : Je suis un pauvre mec coincé ici qui risque d'avoir de très gros ennuis et qui ne pourra jamais devenir un ingénieur reconnu».Beccaline envoya son rubik's cube contre le sol et laissa échapper un sombre rire. Se levant précipitamment, elle ébouriffa ses cheveux courts avec hargne et s’appuya contre le mur le plus proche. En effet, elle avait prit de l'avance sur le mauvais sort, elle l'avait avalé et avait fusionné avec lui. Mais cette épreuve convenait parfaitement à sa nouvelle philosophie de vie :
Aucune épreuve ne peut résister à un cerveau comme le miens. Elle se disait que trouver quelqu'un qui pourrait l'aider ne devrait pas être si difficile ! Tant de classes sociales différentes passent dans les hotels, chaque jour, elle finirait par trouver quelqu'un qui accepterait de l'aider en échange d'autre chose.
... Oui Beccaline, sauf que là, ton cerveau, aussi développé soit-il, ne te servira à rien.