Hotel Dusk
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La république des silences [James]
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Henri Potier

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
▌Age du joueur : 30
▌Commérages : 606

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Henri Potier



Notre français héroïque et national ferma doucement son livre en lâchant un soupir. L'obscurité de la pièce aidant, les mots dansaient d'eux même, sautant sur les pages, allant de ligne en ligne, sautillant d'avant en arrière, tout pour que sa concentration ne puisse s'y accrocher, et que la connaissance de ce qu'il lisait ne puisse l'effleurer. Lire à trois heures du matin n'est jamais conseillé, surtout dans une pièce sous éclairée et à l'air plus saturé en poussière qu'en oxygène. Mais ce n'est pas de sa faute, c'est toujours à la mauvaise heure que l'insomnie frappe, de même que le mal du pays.

Henri n'a jamais rien eu contre l'Amérique, mais y rester coincé, et surtout enfermé dans un hôtel où il n'y a pas grand chose à faire lui mine le moral. Ça le met de mauvais poil, il en oublie d'être souriant et toujours hypocrite, et puis, comme une maladie qui sournoisement progresse, il en vient à se dire que ce qu'il fait, ce qu'il est est dans le fond inutile. Et ça, c'est mauvais.

Alors il finit par se lever, tout faire pour combler l'absence du sommeil, oublier le poids de l'insomnie, et celui de la lune qui lentement l'écrase, le broie. La solitude n'est jamais bonne conseillère. A défaut de voir ceux des autres, elle vous force à voir en vous, et les monstres qui s'y tapissent ne sont jamais très beaux à voir. Son pays lui manque. Il a beau jouer les fiers, ça reste une évidence. Son pays, sa langue, sa ville, ses habitudes. L’Amérique a beau être pleine d'aventures et de promesses, elle n'en reste pas moins aussi vide que son prétendu rêve américain. Une nation d'optimistes hypocrites qui ne voient que la gloire de l'oncle Sam quand il n'y a que de la richesse née du malheur des plus pauvres...
En désespoir de cause, il s'était rendu à la bibliothèque. Lire, lire, et s'évader, partir. A défaut de trouver du Marcel Pagnol, lecture facile portant les fragrances de ses collines, il avait trouvé Camus. La Peste. Le parallélisme entre sa situation, enfermé dans un hôtel avec des inconnus pour des raisons inconnues, et celle de ces êtres enfermés dans leur propre ville en proie à la maladie eu le mérite de le faire sourire... Jusqu'à ce que la fatigue l'emporte et lui arrache son seul moyen de se changer les idées.

Ainsi, il s'était renfoncé dans son fauteuil, et avait regardé en arrière, vers la fenêtre, le ciel, les étoiles, cette liberté qui lui avait été interdite.

Et ce fut la fin de la minute philosophique. A la place, il avait levé les bras pour se protéger d'une pluie d'objets non identifiés mais indubitablement lourds, et douloureux quand ça vous tombe sur la tête et le ventre.


- Que...bordel de merde!

[NB: italique = en français dans le texte]
James Leighton

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
▌Commérages : 471


James Leighton




  • J'étais dans ma chambre. Encore et toujours ...
Observant les étoiles tel on observe un vieux trésor datant de notre enfance, comme si elles m'avaient vu grandir pendant des années. Ce qui n'était pas faux, mais surtout réciproque. Autant les millénaires c'étaient écoulés pour un comme pour l'autre, autant elles arrivaient lentement et inégalement à la fin de leur longue vie, remplies de rêves donnés. Voilà, oui, ce qu'elles signifiaient vraiment, ces lumières accrochées dans le ciel comme des lampes pour éclairer un chemin. Des éclaireuses, celles qui guidaient le chemin des matelots perdus en mer, indiquant inlassablement le nord par le Voie Lactée et la Grande Ourse. Celles qui remplissaient le cœur de mélancolies, aussi, signes sensés être joyeux, tel un salut, de ceux qui sont partis avant nous, vers d'autres contrées bien plus belles. Les étoiles étaient aussi un symbole de l'espoir, du moins le trouvais-je. Toujours présentes quoi qu'il arrive, on peut se plonger en elles pour éloigner tous nos soucis et nos peines, laissant autant parler l'esprit d'un doux rêveur qu'un scientifique chevronné. Oui, vraiment, les étoiles étaient une magnifique création. Qui venait bien évidemment de l'ennemi de la famille. Pourquoi, mais pourquoi étais-je ce stupide Vice ? Oh, Shelley aurait trouvé plein de réponses. Moi, je n'en voyais aucune. Et tant mieux, d'un côté. Je ne voulais surtout pas savoir mes affinités avec les autres, cherchant sans cesse à m'en éloigner plutôt qu'à simplement les ignorer. Non, je ne pouvais pas mentalement laisser tout filer, mais je n'avais pas le choix. Que faire, seul, face à tous mes frères et sœurs, vicieux jusqu'au bout ? Je n'avais pas de réponse, si ce n'était "rien". "Attendre", aussi, mais les tortures qui se déroulaient devant mes yeux ne me donnait pas ce luxe, encore moins par la présence de mon propre Vice. Ma Maladie. Ma chère et sadique compagne pour l'éternité ...
Les étoiles mes faisaient aussi cet effet, celui de penser sans limite pendant des heures. D'ailleurs, il devait avoisiner les premières heures du jour, mais je n'en avais aucune idée, à par l'impression d'un "trop tôt" par rapport à "trop tard". Trop tôt dans le temps, oui, trop tôt aussi pour faire semblant d'oublier mes pensées, trop tôt pour partir de ce magnifique tableau vivant. Mais trop tard, parce que tout était déjà joué et que je n'avais pas à y mettre mon grain de sel. De quoi je parlais ? Qui sait .. Même pas moi. C'est ça aussi, la magie de l’imagination, ne pas savoir de quoi on parle, on pense, mais s'en sortir quand même. Certains détestent, ça m'est égal. En même temps, je prends rarement position. Venant sentir une nouvelle vague de pensées, je m'arrêtais avant d'avoir bien commencé, retournant à mon idée principale. J'étais fascinée par la Voie Lactée, oui, mais qu'en connaissais-je réellement ? Rien, et même si je voulais créer de toute pièce une qui me serais propre, j'avais besoin des bases. Et le meilleur moyen d'y arriver était d'emprunter un livre. Vu l'heure tardive, personne ne devait traîner dans les couloirs, c'est ainsi que je fermais doucement la porte de ma chambre pour aller à la bibliothèque poussiéreuse de l'hôtel. J'avais peur des foules, depuis toujours. Peut-être parce que ça me rappelais un effet de contamination ? Oh, à nouveau, je n'en savais rien, aussi faible et idiot que j'étais. Marchant décidément mais tout de même d'un pas doux vers la porte en bois massif que j'ouvris, j'aperçus directement les lampes allumées de leur lueur jaunâtre à côté des fauteuils rouges au style rétro, tapissés de poussière. Allergique comme je l'étais, je n'avais pu empêcher un éternuement, mais j'étais heureux d'être ici.
Allant directement à l'endroit qui m'intéressait, je cherchais le bon ouvrage qui aurait pu assécher ma soif d'apprendre dévorante, passant de rayons en rayons, avant de tomber dessus. Mais, comme rien ne pouvait être simple, l'ouvrage choisi était mis en cale-pied pour une étagère, en dessous, mais je le voulais, lui, aucun autre. Je le savais, mais je me bornais tout de même à chercher un autre livre, revenant finalement à la case départ. Je n'arriverai pas à soulever l'armoire, je devais donc uniquement tirer le livre jusqu'à moi. Ce que je fis ... Mauvaise idée.
Dès le début, j'eus du mal. Déjà à faire preuve d'une quelconque force, mais dès que j'avais entendu ce craquement, je savais que j'étais dans la misère. Oh, Hazel .. Ce bruit, en fait, venait de deux endroits différents. Le premier, celui que je sentais le plus, venait de mon bras, le coude, pour être plus précis. Une luxation. Et elle faisait mal. Deuxième craquement, celui du bois de l'armoire qui n'avait plus son support. Ce qui était tout de même plus inquiétant. Ne réfléchissant pas et me collant contre le bois pour le faire basculer de l'autre côté, je ne sais pas vraiment si ça eu une quelconque résonance sur ce qui se passa après, mais bon, peu importe, l'armoire fit demi-tour pour larguer tous ses livres de l'autre côté, avant de revenir vers chez moi. Prenant mon livre de mon bras valide, je me pressais pour m'en aller de sous cette étagère, un nuage de poussière tout autour de moi. J'éternuais, je pleurais, j'avais mal, bref, la routine, presque. Quel foutu vice, quand même, ce déboîtement me faisait mal, trop, même. Mais j'avais mon livre, j'étais prêt à sortir en vitesse si je n'avais pas entendu cette voix.
"Bordel de merde.", quelle classe .. Ironiquement, n'est-ce pas ? Oui, je comprenais le français, en même temps, comment passer à côté des pièces de Molière, des poèmes de Victor Hugo ? Impossible pour ma part. Néanmoins, je n'avais pas compris de suite, mon cerveau embrumé par une nouvelle migraine qui commençait. Ce pourquoi je restais d'abord là, debout, un bras désarticulé et l'autre serrant fort le livre -jusqu'à blanchir la jointure des doigts. Déposant précipitamment l'ouvrage, j'allais vers le tas de livres et poussière, éternuant de plus belle, avant de dégager des bouquins de mon seul bas, les yeux fermer, jusqu'à sentir une main. La serrant, j'essayais de la tirer avant de glisser et tomber stupidement par terre, les fesses contre le sol. Stupidement, comme moi.
  • Je ... Je suis désolé ...
Une petite voix, toute petite, qui brisait le silence après la chute. Dit d'un français sans faute, ma réplique démontrait à peine un accent américain, mais là, ce qui m'intéressais plutôt, c'était l'homme sous les livres. Et mon bras, aussi. Attendant que quelque chose se passe, je serrais mon coude "mort" contre moi, comme pour le protéger, des larmes coulant quelques fois le long de mes joues. Qu'avais-je encore fait ?!
Henri Potier

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
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Henri Potier



La valse des ondines

Il y avait une odeur caractéristique de poussière, de vieillesse sans la puanteur dégagées par les Hommes, d'encre décrépite... Non, strictement aucun doute à avoir là dessus, ce qui lui avait plu sur la tête et l'ensevelissait à moitié, c'était des livres. Non pas que ce ne soit pas un fantasme, être couvert de bouquins, mais là, ça en devenait légèrement douloureux. Surtout quand on se prenait l'édition intégrale de "A la recherche du temps perdu" sur la tempe. Trois mille pages et une reliure en carton, ça a son petit effet quand ça tombe de l'étagère la plus haute. Un effet percutant qui nous permet d'illustrer à merveille l'expression "le poids des mots". Sonné, il avait décidé de rester immobile le temps que des étoiles d'un noir éclatant (lorsqu'on est sonné, les oxymores peuvent prendre tout un sens qu'on ne cherchera pas à contester) cessent leur danse devant ses rétines, c'est très incommodant pour voir et réfléchir. Sans oublier le fait que ça faisait un mal de chien. Il était partit pour se payer de ces bosses... Draguer qui que ce soit avec CA risquait d'être compromettant.

Mais voilà qu'une âme charitable, ou du moins coupable, ce qu'il croyait plus, parce que trouver quelqu'un à une heure aussi indue dans la bibliothèque, ça fait que ça ne peut être que lui, ou elle, qui est la cause de son aventure pour le moins malheureuse, venait de le tirer de sous son tas de livres. Bon, ce n'était pas la manière la plus délicate de faire, on le reconnaîtra, mais c'est le geste qui compte.


- Ah ben merci b...

Son amorce d'engueulade s'était coincée dans sa voix en constatant l'état pitoyable de l'autre. Des larmes qui coulaient de manière anarchique, des cernes qu'il n'aurait jamais pu espérer avoir, même dans ses insomnies les plus totales, un air pâle qui vous cataloguerait comme le pire des parisiens si on le voyait sur le Prado... C'était lui l'agressé, mais on dirait bien que c'était l'agresseur qui avait besoin d'aide. Avec un air aussi fragile, il ne se sentait pas assez vil pour lui crier dessus. Mais bon sang de bois, il avait la tête qui vibrait comme une cloche !

- Ce n'est rien...... Oh... I mean no matter.

Pour le coup il en avait perdu son anglais, le pauvre. D'un côté, quand le type en face vous parle dans sa langue natale, le premier et légitime réflexe est de continuer sur ce mode, non? ... Non. Il se redressa péniblement et s'approcha du petit. Une subite humidité lui apprit que en fait Proust avait tenté de lui casser la tête au sens véritable du terme, mais qu'il avait finit par se contenter d'essayer de le saigner. Pas grave, ca fait mal, mais c'est rien. Pas contre l'autre...

Foutue pour foutue, il défit sa chemise et l'employa pour en faire une vague boucle qu'il passa au cou de l'agresseur, avant d'y loger le bras blessé avec toute la délicatesse du monde. Le laisser pendre comme ca risquait de faire encore plus mal et empirer la chose.


- Il y a un médecin à l'hôtel. Malcolm Chace... Vous irez le voir pour votre bras.

Il ne savait même pas pourquoi il se mettait à l'aider, mais c'était plus fort que lui. Il lui faisait penser à un chaton à qui on aurait marché sur la patte.
James Leighton

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
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James Leighton




    La douleur.
Simplement, uniquement, à l'état pur, qui déchirait mon bras comme on brise un fétu de paille entre ses doigts. C'était presque si je ne sentais pas de longues griffes fines s'incruster doucement dans les moindres recoins de mon coude avant de brusquement bouger dans tous les sens, se jouant franchement de mes os, les faisant craquer, sursauter avant de les laisser choir. Mes pauvres muscles tendus face au mal qui me rongeait, je savais que ça ne ferait qu'empirer les choses, mais et alors ? Je méritais à nouveau de souffrir. Si j'aurais pu, j'aurais pris toutes les bosses à sa place, toute les coups, les élancements, les coupures, tout. Je me sentais si coupable, si faible que je n'arrivais même pas à contrôler ce que je faisais. C'était toujours ainsi, je fais toujours du mal aux autres sans le vouloir, que ce soit à travers mon Vice, ma chère Maladie, mon apathie, mon anémie ou mes simples gestes. Ce pourquoi je ne parlais plus. Je savais que je risquais d'en blesser d'autres par des mots résonnants de manières différentes à leurs oreilles, ainsi, je parlais silencieusement. A travers des murmures, des peintures, des traits, des signes, des notes, des mélodies et autres musiques. Mais toujours aussi calmement. Pour ne pas vexer encore plus de monde ...
La poussière flottait dans l'air, formant un réel nuage informe, retombant à sa place d'origine après quelques minutes de suspension, c'est-à-dire sur les livres, comme quelqu'un retrouvant une de ses vieilles habitudes. C'était ainsi, et ça devait le rester. Mais non, non et encore non, j'étais obligé de changer les choses pourtant si ancrée dans la vie de tous les jours. Et ça me faisait peur. J'étais angoissé par les moindres changements, savoir que rien ne sera comme avant, car souvent, ça devenait pire. Et ma situation était un bon exemple, là, maintenant, le bras désarticulé, les larmes chassant la poussière accumulée sur mes joues, le dos contre le mur, pleurant ridiculement au son de l'harmonie d'aiguës qui se jouait dans ma tête, long et lent cri strident. Pitoyable, c'est sûrement l'impression que je donnais. Entendant des mots, je réagis alors brusquement en relevant la tête, l'observant de deux grands yeux vides. Ses paroles arrivèrent en écho dans ma tête embrumée par la migraine et la douleur, résonnante de longues secondes.
I mean no matter. Il me ... pardonnait ? Mon air devait vraiment être très miséreux, pour qu'il passe sur tout ça aussi rapidement. Je lui avais quand même renversé une bibliothèque dessus ! Vraiment, je commençais à nouveau par me dégoûter de moi-même. Alors que je l'observais, je voyais un filet de sang couler le long de sa tempe. Ma faute, à nouveau. Je baissais les yeux, incapable de regarder en face ce que j'avais fait.
Le silence remplit à nouveau la salle, lourd, avant qu'il ne bouge vers moi. Je gardais mes yeux obstinément collés au sol, ne voulant en rien croiser son regard, sûrement lourd de reproches. Mais non, rien, même au contraire. J'ai vu une chemise entrer dans mon champ de vision, accompagné des mains de ma victime, nouant une sorte de repose bras pour mon coude brisé. Je papillonnais des yeux, incrédule, avant de le dévisager. Pourquoi m'aidait-il, moi qui ne méritait aucunement sa sympathie ? Reposant malgré tout mon bras droit dans la chemise, je poussais un soupire de soulagement. Décontracter ce muscle me faisait réellement du bien, mais je ne voulais pas aller voir ce médecin, Chace, comme il me le conseillait. Je ne voulais surtout pas servir de cobaye, j'avais déjà assez de maladies ainsi pour qu'on ne me fasse pas d'autres tests inutiles. Et puis, j'avais mérité de souffrir.
Me levant pour me diriger vers le tas de livres, je m’accroupis pour passer ma main valide sous l'étagère, tentant de la remettre à sa place. Peine perdue, et je le savais. Stupide James ... Je me relevais, dos à lui, incapable de me retourner et de le regarder en face. Une voix hésitante sortit de ma gorge, résonnante dans ma tête.

    M-Merci ... Mais, pourquoi avoir fait ça ? Je vous ai fait du mal ... C'est plutôt à vous d'aller chez le docteur Chace.
Oh, j'avais bien d'autres questions, mais je ne voulais pas plus lui parler. J'avais trop honte ...
Henri Potier

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
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Henri Potier



Le moins qu’on puise en dire, c’était qu’il était assez… Étrange. C’était le premier terme qui lui venait à l’esprit. Certes, il est de bon ton de paraître désolé quand on a fait une boulette, surtout quand elle implique que d’autres soient impliqués –et blessés-, mais son affliction semblait disproportionnée par rapport au tort créé. Bon, il avait mangé l’intégrale de A la recherche du temps perdu sur le coin de la tête, ça ne fait pas du bien, mais ce n’est tout de même pas la peine d’en faire une jaunisse, surtout à une heure pareille, et surtout avec le bras déboîté / tordu / luxé ou il ne savait pas quoi encore. Il a eu beau regarder Docteur House et lire des romans à propos de médecins, il n’en a jamais fait sa vocation et éprouve par conséquent des difficultés de diagnostic.

Il lui faisait un petit peu penser à ces enfants battus qui, même quand ils ne sont pas en tord, s’excusent avec panique et cachent leur visage de peur d’un coup. Bien que pouvant parfois l’agacer, cette attitude avait tout de même pour effet actuel d’éveiller en lui des instincts de protection. Certes, si ça avait été quelqu’un qui l’aurait royalement insulté en lui faisant comprendre que c’était de sa faute si il se l’était mangée sur la tête, cette étagère, il l’aurait mal prit et exigé qu’on lui apporte réparation. Mais en l’occurrence c’était arrivé parce qu’il s’était blessé, qu’il avait mal et qu’il n’y était pour strictement rien. Ainsi, inutile de l’enfoncer encore plus… Du moins il est totalement gratuit de l’enfoncer alors qu’il semble porter sur lui tout le malheur du monde.
Piochant un mouchoir dans sa poche, il tamponna vaguement sa tête dans le vain espoir de ne pas s’en mettre de partout. Mais les blessures à la tête étant ce qu’elles sont il renonça assez rapidement. C’était totalement inutile en plus d’être ridicule.

En plus de ça il s’acharnait le petit. Le français poussa un petit soupir et s’approcha du blessé pour le porter, comme une princesse ou un enfant. Pour le moment, c’était un petit peu comme ça qu’il le voyait. Un enfant terrifié. Avec toute la délicatesse dont il était capable, il déposa son précieux fardeau dans un fauteuil non enseveli par la pluie littéraire et pas trop loin pour éviter qu’il se sente exilé. Si on le laissait faire, il allait empirer son cas, le pauvre.


- Les blessures à la tête sont impressionnantes mais superficielles. Restez calme, c’est vous qui êtes le plus mal en point.

Ce faisant il lui fit un petit sourire afin de lui exprimer le plus clairement possible qu’il allait bien, qu’il ne lui en voulait pas, et donc qu’il fallait arrêter de faire ces yeux de cocker battu et jeté sous la pluie avant d’être écrasé par un camion de pesticides. Et ensuite il se pencha sur l’étagère sinistrée et la souleva doucement afin de ne pas se briser les lombaires. Un bras cassé ça suffit amplement. L’armoire remise en place, il contempla la mer de livres à ses pieds avec un petit regard désespéré.

- Et vous êtes pardonné. Ce n’est pas de votre faute, et visiblement vous avez déjà eu pénitence.

C’était cher payé tout de même pour une simple armoire. Il s’était penché pour ramasser les livres, mais une goute carmine sur une couverture le persuada d’arrêter immédiatement son œuvre d’Attila. Si il devait faire un brin de ménage, il le ferait quand il aurait cessé de saigner. Super. A petits pas prudents afin de ne pas risquer de tomber à cause d’un vertige, il ne manquerait plus qu’une commotion, il se rapprocha du fauteuil où il avait laissé le blessé.

- A votre tête, vous n’allez pas y aller, hein…

Lui-même n’était pas trop ami avec eux. Par principe. La plupart des maladies qu’il attrapait étaient dues au stress. Or, à la longue il avait fini par en avoir assez de payer pour s’entendre dire « je ne vois pas, ça fera 25 euros. ». Quitte à ne pas savoir, autant ne pas savoir, mais avec son argent dans sa poche. Cette pensée lui arracha un léger sourire, et puis un soupir.

- On attend de voir si ça arrête de saigner, et pour peu que ma tête ne tourne pas on va le voir ensemble.

Cela semblait être un bon compromis. Comme ça il ne hurlerait pas comme une vierge effarouchée, et lui aurait la certitude que Caliméro se soignerait correctement.
James Leighton

▌Date d'arrivée : 03/08/2011
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James Leighton




    Inutile ?
Oh, même pas. J'étais plutôt le boulet au pied des prisonniers, celui qui suit toujours ce à quoi il est destiné, rappelant sans cesse sa fonction. Chez les enfermés, il signifiait le délit, et suivant les personnes, une honte, une haine ou le temps, parmi tant d'autres. La maladie, accrochée aux moindres pores de peau des gens ne lâchait pas, ayant dans son sillage de simples désagréments, à la mort pure et simple. La colère ou le désespoir, voilà ce que j'apportais au monde, un des boulets les plus lourds. Après tout, la maladie n'enveloppe-t-elle pas la vieillesse ? La famine ? La folie ? Ne crée-t-elle pas la guerre, la tromperie, la misère ? Ne restait plus que la passion pour finir le tableau et afficher ma chère famille en moi. Mais elle aussi pouvait être provoquée et gâchée par des envies, mais ça restait à discuter. Heureusement ... Je ne veux pas être un espèce d'ensemble d'eux, non, sûrement pas .. Ce qui me fait toujours revenir au même sujet. Il faudrait vraiment penser à changer de registre, mais ces histoires m'obsèdent, tout simplement. Je ne peux pas arrêter de me repasser ses sombres pensées dans la tête, d'y réfléchir et de toujours tomber au même résultat : je suis un Vice. Point. Non, non et non, pas point, ce n'est pas tout, loin de là, je suis la Maladie, un des plus grand fléau du monde. Oh, les autres auraient été fiers. J'en ai honte. Mais d'un côté, j'avais aussi certains avantages, non ? La maladie n'était pas qu'une mauvaise chose, si ? Elle pouvait permettre d'adoucir la mort ... ou bien de la rallonger, aussi, rendant encore plus horrible et lente ce dernier moment. Voilà, j'étais obligé de toujours voir le négatif, partout, même quand je promettais le positif. Mais d'un autre côté, n'étais-je pas également un poids pour les Huit ? Oh, qui sait, peut-être n'étais-je qu'une chose en moins, de toutes façons, ils n'ont pas besoin de moi pour torturer les autres. Je me contente d'essayer de réparer les pots cassés, souvent en miettes. Tout ça m'étais revenu en mémoire en voyant ce livre, sur la pile, presqu'au dessus. "Les Fléaux du Monde", d'un auteur inconnu.
Je restais bloquée sur cette vue, incapable de m'en détourner, une nouvelle vague de larmes remontant doucement vers mes yeux. Et toujours la même question qui revenait, attendant une réponse certaine que je voulais troquer contre une autre, mais c'était simplement impossible. On ne peut pas tirer un trait sur sa nature. C'est tout, et même si je fais croire à mes pairs que je m'y refuse, ça fait bien longtemps que je me suis rendu compte que renier ça -intérieurement- était stupide. Comme bon nombre de mes idées. Voilà le deuxième mot qui me définissait, après inutile : idiot. Quel beau tableau, pour le peintre que j'étais. Sérieusement, de l'humour noir, à un moment pareil ? De toutes manières, quoi faire d'autres ... J'étais bloqué dans mes pensées, ne pouvant bouger mon chétif corps, d'un côté résigné à remuer ses choses mais autrement révolté. Je ne voulais pas, tout en voulant. Oh, je ne me comprenais même plus moi-même -si j'y suis arrivé un jour ... Je me sens soulevé, mais mon regard reste figé sur le livre. De la chaleur m'enveloppe, des bras, aussi, mais je n'arrive pas à m'y mettre comme je l'aurais voulu, à en profiter un maximum. C'est ça, que j'aurais voulu, du réconfort, de l'aide, une présence. Mais c'est impossible, ils ne peuvent pas se rendre compte. Les autres, oui, tous ceux qui pourraient me soutenir, ils ne savent pas qui je suis réellement. Tant mieux, d'un côté : ils ne me fuient pas, alors. Mais le contact cessa, je me retrouvais sur un de ses fauteuils rouges, rembourrés d'un je ne sais quoi, rempli également de poussière. Et l'éternuement ne vient pas, mon corps est plat. Vide. Parce que mon esprit veut s'échapper, voler vers d'autres horizons. Plus calmes. Plus doux. Plus heureux. Plus simples ...
Il me parle, me sourit. Je le regarde, assis sur mon siège, le dos droit, mon bras relâché et encharpé me vrillant toujours ce coude mort. Les sensations, les sons, la douleur, tout me vient de loin, arrivant tel un coton de ronces pour résonner bien des secondes dans ma boîte crânienne. Jusqu'à ce qu'un mot arrive et me fasse l'effet d'une douce brise parmi l'enfer de mon imagination.
"Pardonné". Merci. Oh, oui, tant et tant ! Je recommençais à pleurer, alors, mais non pas de douleur. De faiblesse. Je ne le méritais pas, loin, loin de là. Tout était de ma faute, de sa bosse sur le front à son acné ou sa seule et unique varicelle. Je revenais doucement à moi. M'étais-je évanouit ? N'était-ce qu'un rêve, un songe ? Incapable de répondre, à nouveau, et mes yeux glissèrent vers le blond. En réalité, il ne l'était plus vraiment, une sombre tâche rouge ayant coloré une partie de sa tignasse. Du sang ... Une idée fusa. Ne pouvais-je pas l'aider ? Pour une fois qu'une réponse m'apparaissais clairement .. Oui, bien sûr que je pouvais le soigner ! Un de mes sourire apparu, mais je le voyais plutôt comme espérant, ou du moins, c'était ainsi que je voulais le faire interpréter. Comme s'il voulait aider, encourager mon projet, il s'approcha. Je me levais, à sa hauteur. Ses paroles me passait bien au-dessus de la tête, je ne l'écoutais pas, aucun bruits ne rentrait dans mes oreilles. Je fixais la blessure, les gouttes s'en échappant. Ne le contrôlais-je pas ? Et les cellules de peau ? Alors, qu'attendais-je pour tout faire cicatriser ?
Un mouchoir blanc à la main, je l'approchais de la source du rouge carmin, fermant par la même occasion les yeux. Me concentrer, cibler, et y arriver. Le tissu blanc atteignit sa cible, le tâcha de quelques gouttes d’hémoglobines. Je le voulais, de tout mon être, et ça se fit. Relâchant la pression du mouchoir et ne ma main gauche, j'essuyais son front avant de prendre avec mon doigt la dernière goutte. C'en était fini de cette blessure. Pour le mal de tête que j'avais senti à son contact, il devra attendre. Je me rassis. C'était ma boîte crânienne qui faisait un manège, maintenant .. L'avais-je attrapé ? Oh, ça m'importait si peu ... Au moins, il ne saigna plus. Je souris alors, simplement, malgré les vertiges qui m'assaillaient. C'était la première fois que j'utilisais ainsi mon Vice .. Aurait-il un bon côté ? Je devais creuser ça. En tout cas, j'en avais clairement l'intention.

    Maintenant, nous n'avons plus besoin d'y aller. Ce n'était qu'une petite coupure, ma compresse l'a vaincue.
Qu'il me croit ou non, c'était ainsi. J'espérai juste qu'il garde ça pour lui, je ne voulais pas connaître les fureurs de ma famille ...
Henri Potier

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Henri Potier



Il avait été assez tenté de lui ordonner de se rassoir, le français. C’est assez triste à dire et voir, mais au fond de lui, sous la couche d’égoïsme narcissique, Henry est un papa poule presque pas refoulé. Par chance, il n’y a que peu de témoins, parce qu’il n’y a que peu de personnes avec qui ses instincts protecteurs ressurgissent. Les autres sont plus des jouets à ses yeux, des petites âmes qui lui sont offertes pour son amusement personnel, et l’art de na manipulation. Mais malheureusement, il y a des fois où il n’a pas envie d’enfoncer la personne, et au contraire il en vient à la materner au sens littéral du terme. Encore une fois on le trouve lourd, mais plus pour les mêmes raisons que celles qu’on lui sort d’ordinaire. Sauf qu’il n’avait pu réagir à temps, et voilà que le blessé se mettait à jouer les infirmières de service. Son regard planté sur le visage du petit, il tentait de comprendre l’utilité de la manœuvre. Mis à part avec un point, ça ne cessera pas de saigner par miracle… Mais bon, si ça pouvait l’aider à arrêter de lui jeter ces regards de chiots malheureux, alors il pouvait bien le lui sacrifier.

Sans savoir pourquoi, il avait ressentit un désagréable fourmillement lui picoter son épiderme déjà maltraitée, et puis… plus rien. Il avait toujours mal au crâne, mais plus une migraine sourde qu’une plaie due à Proust. (Le félon, encore un français à n’en pas douter !). Il continuait de le fixer, assez suspicieux sur le coup.


- Il est fort ce mouchoir.

Il n’avait pas encore été touché par la cataracte, il voyait bien, et surtout il n’était pas dupe. Bien que ça lui semble totalement improbable, il ne parvenait pas à se convaincre que tout était du au mouchoir. Sans doute qu’avec la fatigue il se mettait à voir et imaginer des choses qui n’avaient pas lieu d’être… Sans doute… Mais tout de même. C’était un petit peu gros à avaler. Mais refuser de l’avaler était pire. Un petit mordillement de lèvres, et puis il décida de ne rien dire. Soit il avait raison, chose tout de même incroyable, et cela mettrait le blond dans l’embarras, et il était déjà assez embarrassé comme ça, soit il avait tord et il passait pour un fou paranoïaque. L’un comme l’autre ne semblait que guère plaisant.

- Le mouchoir ne peut rien pour votre bras ? Si c’est le cas, il va falloir s’y rendre encore, je le crains.

C’était une solution à cheval entre les deux. Soit c’était pour dire qu’il n’était pas dupe, et il demandait réellement une autre guérison miracle, soit il l’avait cru, et alors c’était un petit trait d’humour destiné à alléger l’ambiance. Mais également une manière de lui rappeler qu’il ne l’oubliait pas, et qu’il se soignerait. Aucun risque là-dessus, il le traînerait chez Malcolm, devrait-il le faire par les cheveux après l’avoir assommé avec des somnifères.

Mais maintenant que sa tête était redevenue étanche, il pouvait enfin se mettre à ranger ! Non, Henry est à l’extrême opposée d’être maniaque, mais il ne supporte pas qu’une bibliothèque soit mal rangée. C’est maladif. Même chez un libraire, il range les livres dérangés par un client tête en l’air. Sauf qu’il y en a beaucoup des livres à ranger, alors avant de se mettre à tout replacer, il tria les livres par ordre alphabétique. Les a avec les a, et cetera. Et aussi essayer de remettre les séries ensembles, cela peut toujours servir.


- Au fait, je m’appelle Henry. Et vous ?

James Leighton

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James Leighton





    Comme j'aurais pu m'y attendre, il ne me croyais pas.
Je le voyais à son air. En même temps, c'était assez dur à gober, cette histoire de compresse qui stoppe aussi rapidement une blessure. A la tête, en plus. Je ne savais vraiment pas pourquoi j'avais agis ainsi, c'était suspect. Et même s'il semblait assez rationnel pour ne pas croire, même penser, à la stricte et pure vérité, j'allais passer pour un dérangé. Bon, asocial, schizophrène, mort -et sa variable mourant-, non existant .. Ça ne me faisait qu'un qualificatif de plus aux yeux des clients de l'hôtel. Et je ne m'en portais que mieux ... Enfin, d'un côté. Oui, si je fréquente trop les autres -je parle de ceux non viciés-, ils se retrouvent malades. Comme si j'étais maudit, condamné à la solitude. Parce que, bien évidemment, je ne supporte pas de voir des traits déformés par une quelconque bactérie, des nez bouchés suite à un rhume soudain ou un horrible mal de tête, passager, mais uniquement à ma proximité. Bon, ça me permet de rester enfermé dans ma chambre, sans nouvelles à donner, sans absence à justifier, non. Juste continuer longuement à peindre sur les murs, colorer de mes doigts pleins de peinture les touches de mon beau piano blanc, observer les étoiles par la fenêtre impeccablement nettoyée le matin même, écrire les yeux fermés d'un crayon blanc sur une feuille de la même couleur, et voyager. S'enfuir. D'ici ? Oh, de partout. Juste partir. Chez moi, ma vraie et unique maison.
Mais cette nuit, elle était bien loin. A vrai dire, presque à l'étage inférieure, mais peu importait. Je n'aurai de toutes façons pas la force de courir jusqu'à là-bas, mon bras désarticulé, tout en semant ce Français. Mais là, c'était moi qui ne pouvait pas me résoudre à partir : je lui avais fait mal, des livres étaient éparpillés partout, bref, je me devais de tout remettre en ordre. Qu'importe l'état de mon bras, qu'importe mon état en général, plutôt, c'était plus important. Et de toutes manières, je n'allais pas aller le voir, ce docteur, des os, j'en ai déjà bien remis en place, dans mon existence. Entre autres désagréments physiques ... Et plus jamais je n'irais plus chez eux, d'ailleurs, pour rien au monde. Non pas que je ne les apprécie pas, au contraire -enfin des alliés dans la guerre contre les microbes, bactéries et compagnie !- mais leurs tests étaient vraiment trop nombreux, longs et en plus inutiles. J'allais de toutes manières rester malades, alors à quoi servaient tout ça, à part découvrir de nouvelles horreurs ? La peste avait éclaté ainsi, si je me rappelle bien. Oh, mais ce n'étaient que des souvenirs. Désagréables, en plus, alors je n'avais pas envie de m'attarder dessus. Autant penser au futur. Quoi que, non, il semblait encore pire que le passé. Alors le présent ? Il n'était pas joyeux non plus, malheureusement, j'étais coincé avec cette histoire de mouchoir. Et sa remarque ne faisait qu'accentuer mon ressenti. Il me fallait trouver quelque chose, une explication quelconque. Je remis le mouchoir tâché de sang dans ma poche, je n'allais pas le laisser traîner dans la bibliothèque, je l'avais déjà assez mise en bordel.
Et alors que je glissais ma main blanche dans la poche de mon gilet trop grand -oui, je n'étais pas sensé croiser quelqu'un ...- quand un de ces emballages cartonné de médicaments se cogna à ma main. C'était habituel, j'étais paré en cas de pépins, peu importe quand, ainsi gélules, comprimés, fils, ciseaux, sparadraps, tout était présent. Hé ! Mais alors, n'y avait-il pas cette fameuse boîte ? Usant de mes doigts, je décryptais les messages en braille présents sur les différents cartons, jusqu'à trouver le bon. Je l'avais ! Juste là, sous la mains, mais je préférais relire le message : je pouvais bien me tromper, j'avais vite appris le langage des aveugles au cas où je le deviendrai, pas excellemment. Mais c'était bien lui, j'en étais presque sûr, maintenant, alors je l'avais pris entre mes doigts fins, mais il reparla juste avant que je ne sorte cette boîte. Non, le mouchoir n'allait pas m'être d'une aide quelconque, petit plaisantin, si seulement c'était aussi simple .. Et encore non, je n'irai pas chez Chace, quitte à me replacer seul les os. Plutôt l'assommer une deuxième fois, et tant qu'à faire, modifier quelques neurones, de sortes à ce qu'il oublie .. Non. Ce n'était pas non plus la bonne solution. Oh, mais que faire, alors ?
Quoi ? Il parlait encore ? Ah, son nom ... Henri. Typiquement français, à vrai dire, j'aurais pu parier sur ça. D'ailleurs, ça devait lui sembler étrange que je ne me soit pas présenter. En fait, les prénoms, appellations, ne m'intéressent pas. A part une classification, qu'est-ce que c'est, à vrai dire ? Rien. Et puis, ça ne m'intéressait pas, mais s'il me le demandait, la moindre des choses était de lui répondre.

    On m'appelle James.
C'était une voix faible, rattrapée par l'effet des larmes, s'étant peu à peu arrêtée de couler. Je sortis la boîte et la mettait en évidence devant ses yeux. "Stop-hémo", sparadrap hémostatique et cicatrisant qui, comme son nom l'indique, arrête les hémorragie. Le voilà, son mouchoir, s'il voulait une explication rationnelle. Au pire, je n'avais qu'à assurer que son coup sur la tête lui avait fait voir un carré blanc et non pas ces sparadraps.
    Non, un sparadrap n'y pourra rien. Mais je veux d'abord tout remettre en place. Et le docteur doit dormir, à cette heure.
Et une raison de plus pour ne pas y aller. M'avançant vers le tas, je m'agenouillais pour prendre un de ses livres en main, le feuilletant. Une page était presque totalement déchirée. Oh, désolé, chers livres ...
Henri Potier

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Henri Potier



Enfin il avait un nom à mettre sur ce visage baigné de larmes, gonflé, rouge, et ces yeux toujours aussi luisants de culpabilité… Ou peut être autre chose. Quand on a le regard qui brille, on dit souvent que c’est parce qu’on est amoureux, ou une autre idiotie du genre, mais on peut également l’expliquer avec une raison nettement moins romantique, mais ô combien pour réaliste : c’est parce qu’on a la crève. Avec les yeux qui brillent comme ceux d’un veau, ce n’est pas uniquement la maladie d’amour. Le français fit un petit sourire pour le remercier de lui avoir offert son patronyme. Ça ne servirait sans doute pas à grand-chose, ce n’est pas ça qui lui fera arrêter d’avoir tout le malheur du monde sur les épaules. Mais au moins il pourra l’interpeller par son nom, et pas « hé toi », « vous », « t..v… euh… Machin ». Bref, un nom. Et surtout la connaissance, et la mémoire, d’un être passe par son identification. Impossible de se souvenir de quelque chose, ou du moins extrêmement difficile, quand on ne sait pas comment le nommer. Et lorsqu’on ne sait pas son nom, on éprouve des difficultés à remarquer un élément du décor, ou une personne. Puisqu’il a l’intention de se souvenir de lui, au moins pour le harceler pour qu’il aille voir Malcolm, autant se donner tous les moyens disponibles.

Par contre, le manège du sparadrap, il n’y crut pas une seule seconde. Même dans cette lumière tamisée il est encore capable de reconnaître un mouchoir quand on lui en agite un devant les yeux, et surtout il l’avait clairement dit. « Mon mouchoir ». Non, il ne le croirait pas. Et plus il mentait, moins il était enclin à le croire. On a beau le penser complètement attardé et fini à la purée, Henri n’est pas encore atteint de crétinisme.


- Bien sûr, suis-je idiot.

Argumenter des heures durant serait parfaitement inutile. NI l’un, ni l’autre n’en démordrait, alors autant passer à autre chose, ça sera bien moins ennuyeux et ô combien plus efficace. Il fit encore un petit sourire sans chercher à lui ordonner de retourner s’assoir. Il n’était pas un tyran, et il avait visiblement besoin de continuer à se déculpabiliser. Mais par contre, il fit en sorte de porter pour lui tous les ouvrages les plus lourds, lui laissant le soin des plus fins et des moins volumineux afin que la simple idée d’utiliser son bras blessé ne l’effleure même pas. A deux, on avance tout de même plus rapidement, ainsi la mer de livres prit rapidement une forme de petits tas, puis enfin de légère pagaille. Plus qu’une vingtaine et ils auraient bientôt fini. Le blond passa son bras sur son front pour en chasser les traces de sang, mais également de sueur. De toute manière il était bon pour la douche, alors autant faire les choses bien. Pendant qu’il rangeait, il n’avait pas estimé utile de parler. Un homme, ça reste monotâche, mais maintenant qu’ils avaient bientôt achevé celle-ci…

- Vous n’arriviez pas à dormir pour vous retrouver à la bibliothèque à une heure pareille ?

Pour sa part, c’était une attaque soudaine de mal du pays qui avait eu raison de son sommeil. Chacun ses ennuis, sans doute.
La tâche de rangement étant à présent terminée, il se laissa tomber dans le fauteuil le plus proche avec un petit soupir de contentement. Il était content d’avoir tout rangé. Laisser les choses comme elles sont est la meilleure manière de ne jamais s’y mettre. Chez lui, du moins, né avec un véritable baobab dans la main.


- Vous semblez pâle… Peut être devriez-vous vous allonger un petit peu, non ?

L’instinct protecteur du blond était de retour, et assez présent maintenant qu’ils avaient terminé de jouer les fées du logis.
James Leighton

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James Leighton




    Et la page se détacha.
Elle glissa doucement du livre ouvert que je tenais en main, avant de s'enfuir et voler, planant telle une plume. J'observais cette feuille s'éloigner de plus en plus de son berceau, ses lettres en imprimé noires se mélangeant suite à son mouvement. Où allait-elle ? Pourrai-t-elle une fois s'en aller pour de bon et vivre autre part, seule ? Qu'est-ce qu'une page sans son livre ? Oh, peut-être pas grand chose pour vous, mais c'est tellement, tout de même. Des mots, d'abord. Oui, mais pas seulement ! Si ce n'était que ça, quel serait l'intérêt d'un livre ? Aucun. Enfin, après, tout dépend du lecteur que vous êtes, certes, mais les mots font pour la plupart cette douce mélodie qui vous capture à l'intérieur du livre, vous enferme dans son univers. Du sens, voilà ce que possède les belles pages bicolores, tournée avec délicatesse en attente insoutenable de la suite. Mais une feuille, seule, sortie -ou plutôt arrachée- de son contexte, qu'est-ce ? Est-ce triste ? Tout de même pas. Dommage, dirions-nous, car après tout, cette même page était peut-être celle si fervemment recherchée par un quelconque lecteur, ou alors la fin d'une belle histoire. Mais une page seule, c'est aussi une ouverture vers l'imagination, vers ce que l'on veux. Pourquoi se contenter de lire alors qu'on pourrai s'inventer notre propre suite, notre histoire unique, peut-être même jamais pensée ? Mais j'avais quand même pitié de cette pauvre feuille qui descendait doucement vers le sol, qu'elle atteint sans bruit. Je ne pouvais la laisser là, alors je l'avais prise et replacée dans son ouvrage, là où l'on pouvait encore voir une déchirure, pauvre morceau de papier blanc. J'étais désolé, chers livres ...
Refermant assez rapidement le bouquin pour ne pas m'y éterniser, j'entendais l'autre, Henri. Encore de l'ironie ... Tant pis s'il ne me croyait pas, l'explication rationnelle était là, s'il voulait quelque chose comme ça. Après, ça m'étais égal. Ou presque ... Oui, s'il pouvait éviter de parler de ça avec d'autres, ça m'arrangerai bien, notamment face à ma famille, mais rien n'était moins sûr. Il n'y avait qu'à espérer que l'épisode, semblant trop étrange, soit ranger dans un lointain coin de son cerveau. Alzheimer pourrait toujours m'aider, au pire, mais je ne voulais pas non plus lui faire un lavage complet, doué comme je l'étais. Alors autant éviter le plus possible de de nouveau faire appel à mon vice. C'était déjà assez étrange qu'il m'ai totalement écouté tout à l'heure, d'autant plus dans ce cas de figure, mais peut-être la petite séance de coupures-cicatrisées-juste-pour-donner-envie-de-gratter-la-croûte-et-saigner que j'avais dispensée à Jason. Ce que je pouvais haïr ce gosse puéril, même Abbel était d'accord avec moi, c'est dire ! Mais ici n'était plus la question. Le français -d'après ses charmantes paroles du début- commença à ranger les livres, et je faisais de même, alors qu'il me volait les grands livres. Tout de même, je n'étais pas handicapé au point de ne pas pouvoir porter des gros volumes, enfin, il me semblait. Bon, c'était fait gentiment, avec de bonnes intentions, en plus il avait arrêter la stupide bataille qui s'annonçait autour du "mouchoir", alors je m'étais résolu à me taire. Il n'empêchait que j'étais furieux, mais contre moi-même. Même pas capable de porter une encyclopédie tout seul ...
Néanmoins, je continuais ma tâche, doucement, porté par une des musiques classiques de Saint-Saëns que j'écoutais souvent.
Le Cygne était présent dans ma tête, aujourd'hui, et c'était donc ainsi que je fredonnais, les lèvres fermées, les longues notes, déchirées par les cordes des violons. Des sanglots, disait Verlaine dans son poème automnale, et il n'avait pas totalement tort .. J'aurais longtemps vagué dans mes pensées si je n'étais pas retombé sur ce petit livre noir, sobre, dont seules les lettres dorées du titre brillaient à la faible lumière. "Les Fléaux du Monde", comme s'il m’appelait, comme s'il voulait que je l'ouvre pour le lire. Soit. Alors qu'Henri rangeait les derniers livres, je me déplaçais vers le livre que j'avais mis à part, celui traitant d'astronomie, le petit ouvrage sombre caché dans mon gilet, avant de le glisser sans bruit au-dessous de l'énorme traité. Les Fléaux avaient gagné, j'allais les lire, quitte à me dégoûter encore plus. D'un côté, je ne faisais que ça, à longueur de journée ... Soupirant, je m'adossais contre un mur, le visage fermé fixant mes pieds. Tiens, j'étais en chaussettes. J'allais encore avoir droit à un refroidissement, sûrement. Une question. Encore. A vrai dire, je n'avais pas envie de lui répondre, tout de suite, là. Avais-je été momentanément atteint d'apathie ? Qui sait, mais seul le silence remplit les lieux pendant qu'il s'asseyait. Une autre question. Décidément, il parlait beaucoup, cet homme, mais n'était-ce pas une des caractéristiques des français ? Parler beaucoup -pour ne rien dire, certaines fois. Et je l'écoutais à nouveau, ne pouvant m'empêcher un autre soupir, mais plutôt exaspéré. C'était toujours la même chose, qu'importe la personne, le lieu, le temps, la période, ma maladie ... "Ça va, James ? Tu veux quelque chose ? Viens, assis-toi, tu es blanc comme un linge !" Toujours. Tout le temps. Ou sinon, la version de Caïn et quelques autres, plus violente. Mais le résultat est le même, pauvre petit James tout faible. J'en avais assez, oui, depuis longtemps, mais ... Encore et toujours mais. C'est la vérité, voilà le "mais". La simple et pure ... J'avais relevé mon visage pour le fixer directement avant de glisser le long du mur et de m’asseoir contre, le livre -et l'autre caché- dans mes mains. Au moins m'étais-je allongé ...
    J'étais venu pour regarder les étoiles. Elles brillent bien, ce soir.
Je m'étais arrêté pour fixer l'extérieur, à travers les fenêtres bien sales de la bibliothèques. Encore de la poussière ...
    Et je vais bien, merci, il ne faut pas s'inquiéter, c'est habituel, même ...
Une de mes mimiques tristes traversa mon visage, rivé sur mes genoux. Peu de personnes comprenait que j'en avais assez qu'on me dise de faire attention et tout ce qui allait avec, ainsi je fuyais les autres. A long terme, ça m'énervait, oui, même moi cédait parfois au vice de Caïn. C'est dire.
    Merci, en tout cas, pour votre aide.
Ainsi avais-je terminé les quatre phrases, ma réplique. J'avais beaucoup parlé, du moins plus que d'habitude. A vrai dire, les questions ne récoltaient souvent que silence pour réponse ...
Henri Potier

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Henri Potier



Il avait remarqué cette page volante. C'était un petit peu dommage, sans doute, mais bon... Une seule page pour toute une bibliothèque, il estime que c'est une très bonne marge. Il n'aime pas qu'on abîme les livres, mais il n'en fera pas une jaunisse si c'est le cas pour autant. Il apprend à relativiser. Ce qui est fait est fait, et tant que la page est gardée, le récit intact, on fait avec. Il a, chez lui, son chez lui derrière l'océan, une bonne pelletée de livres dans cette condition. Non pas que ce soit un sagouin, mais à force de les avoir lu, la reliure lâche, et les pages lui restent dans les mains quand il essaie de les tourner. Maintenant, ces livres ressemblent un petit peu à ces anciens grimoires, avec beaucoup de pages ajoutées, d'autres arrachée, d'autres détachées... Il a toujours refusé de les remplacer par des nouveaux. Tout le monde pense que c'est par égoïsme et puérilité, comme toujours avec le "jeune maître", mais lui, il en connaît la raison. Et elle est très simple, stupide pour certains : ce sont de reliques de son enfance, de ces jours passés la tête dans les rêves et la fantaisie, ses échappatoires de sa prison dorée et de ces sourires commerciaux. Voyez? C'est simple comme une larme, mais hors de question de le partager aux autres. Il a passé bien trop de temps à se construire une image de petit con branleur pour la faire voler en éclats par un peu de mélancolie. De même que son piano et son violon. Hors de question de montrer qu'il avait continué, et que actuellement il travaillait sur le troisième acte de l'été de Vivaldi. Plutôt crever.

Mais ces livres anonymes, offerts et consommés par d'autres, comme une fille de joie sur la fin de ses jours, leur destruction ne lui faisait rien de plus qu'une légère chaleur dans la poitrine. Si il apprenait qu'on avait jeté sa collection en France pendant son absence, par contre, il jurait solennellement sur le Dieu en lequel il ne croyait pas qu'il mettait le feu à la maison. Et peut être au jardin, tiens. Il n'a jamais été pyromane dans l'âme, mais il faut bien commencer par quelque part.

Un léger sourire étira ses lèvres en entendant sa réponse. Les étoiles? Son regard se porta à la fenêtre. Pour ce qu'on pouvait en voir à cause de la poussière... En effet. Il faut croire aussi que dans un désert, si on ne peut pas voir les étoiles, on ne les voit plus. C'est peut être l'un des avantages que l'on puisse trouver à de tels environnements. Pour sa part, il trouve que ca manque un petit peu de vert, et de blanc. Tout est ocre et gris par ici. Ces couleurs l'agressent, elles le dépriment. Et en plus la nuit il fait froid. Mais oui, l'hôtel étant la seule source de lumière environnante.... Les étoiles ressortaient bien. Il a toujours trouvé le principe poétiquement intéressant. S'éloigner de la lumière pour mieux en voir une autre... Et parfois le cadavre lumineux d'êtres déjà disparus.

Ah, mince. Voilà qu'il s'était perdu dans le ciel ! Une heure pareille ne réussissait guère au Français qui, en règle générale, est bon pour la poubelle quand il n'a pas eu ses neufs heures de sommeil. C'est un petit peu pathétique, mais bon, il est comme les enfants. Mais après, l'heure du coucher importe peu. Vingt heures, deux.... il se réveillera toujours les neuf heures de récupération obtenues et consommées. La pire punition pour lui : l'insomnie.

Pendant que les astres lui avaient ravi son cœur et ses yeux, le jeune homme s'était assis. Tant mieux, il n'aura donc pas à guetter au cas où il lui ferait un malaise. Il racontait quoi, d'ailleurs, le moribond? Ah, les phrases de politesse.


- Ce n'est rien. Je n'allais pas laisser quelqu'un qui s'est explosé le bras tout ranger. Je suis un connard, mais il y a des limites.

Personne pour l'engueuler, il ramena ses genoux contre lui. La position fœtale a le bonheur de garder votre chaleur en même temps que vous caler efficacement contre vous même. Ses professeurs l'ont toujours harcelé pour qu'il se tienne droit et correctement, donc il ne peut l'employer qu'en l'absence de témoins, et personne à draguer dans les parages. Mais comme pour Todd, il ne drague pas les gens malades ou blessés. Et James semblait remplir ces deux fonctions, étrangement.

- Du toit, on pourrait mieux les voir, non? ... Ah merde c'est vrai qu'il est fermé.

C'était extrêmement dommage d'ailleurs. Le toit, c'était une occasion d'un contact direct avec le ciel. Certes, il le trouvait un petit peu trop profond dans le coin, trop bleu et pas assez de nuages, mais c'était tout de même un morceau de ciel et de rêve. Le voir à travers des vitres sales n'est que guère plaisant.
James Leighton

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James Leighton



    Tiens, ça faisait un bout de temps que la pluie n'était pas venue nettoyer les fenêtres.
La pluie, les gouttes, qui passaient de temps en temps, laissant sur les vitres de longues descentes irrégulières. J'aimais bien observer les gouttes glisser sur le verre, emporter avec elle la poussière pour disparaître. Simplement. Où allait-elle ? Rejoindre ses pairs, sa famille de gouttes, parmi les nuages non présents dans ce désert. Sec, ensoleillé, il n'y a pas le temps et la place pour rêver. Alors je m'imagine. Dans mon univers. Comme je veux. Sans maladies, sans Vices, sans malheur. Mais sans joies, sans envies ni rien d'autres. Juste de l'espoir et du calme. Et le vent, le vent qui chante et s'amuse à se faufiler dans les cheveux du corps fictif, celui de là-bas. Loin, loin d'ici, bien trop loin pour que quelqu'un me suive. Oh, une personne s'y est déjà glissée, oui, mais lui, c'est différent. Je me devais de le faire, lui faire voir un autre monde que celui où tous vivent, un univers propre à soi. Alors que j'avais fait dresser des hautes tiges d'herbes, de marguerites et de coquelicots, il m'avait emmené dans le sien. Il avait vite compris, si vite que c'en était effrayant. Mais je le voulais, je voulais qu'il sente lui aussi la paix, un endroit propre à soi. Et il m'avait invité dans son univers aquatique, rempli de rêves comme de livres. Il aimait la mer, je préfère la pluie. Peut-être parce que c'est plus mélancolique, moins joyeux. Mais je me devais de le faire sourire, à nouveau, lui, ma victime. Je ne voulais pas, non, je n'avais pas le droit. La maladie avait choisie seule, sans me consulter, le frappant de toute sa splendeur. Et il devait être dans cet hôtel, sous mes yeux, pour que des gouttes sortent à nouveau d'eux. C'était ça, aussi, la pluie. Les larmes des nuages, peut-être même un message de l'ennemi de mon père. Dieu et ses anges blancs, si beaux et éclatants. Ô combien j'aurai voulu être des leurs, ô combien j'aurai voulu ne pas exister. Pas comme ça, en tout cas, pas en souffrance et perte d'espoir. Je n'étais même pas assez digne de les regarder, alors que serait-ce en faire partie .. Tu rêves encore, James. Ne te crée pas de faux espoirs, tu vas encore tomber de haut. Et te faire mal, toujours plus, jusqu'à craquer. Ce n'est pas ce que tu veux, tu le sais, alors arrêtes.
Étais-je devenu fou ? Qui sait. Déjà assez pour croire en une chose inexistante. Et en dépendre, en plus. J'avais besoin de ces moments indescriptibles comme un accro veux sa drogue. Mon univers ne fonctionnait-il pas comme de la morphine ? Si, en quelques sortes, sauf que je sais qu'un jour, ce ne sera plu possible et qu'irrémédiablement, je ne pourrai plus y aller. Manque de force, d'espoir, d'envie, qu'en sais-je ... Alors je cherche autre chose, pour remplacer un tant soit peu mon monde de paix. Je n'avais trouvé qu'une solution : les étoiles. Poétiquement, elles s'infiltrent dans vos coeurs, atténuent vos moeurs et vous emportent au loin, vers d'autres horizons. Une autre dimension, planète, cosmos, peu importe. Tant que je fuis, comme le lâche que je suis. Lâche, si ce n'était que ça ... Fixant d'un air absent la fenêtre, je me perdais encore dans les étoiles, ces scintillements qui m'attiraient tant. J'en avais presque oublié Henri, complètement s'il n'avait pas parlé, mais ses mots ne s'incrustèrent pas dans mon esprit. J'étais parti, un peu, au moins, et s'il n'y avait qu'une chose qui me reliait à cette bibliothèque, c'était le contact du mur contre le haut de mon crâne. J'en avais oublié la Douleur, la sombre amie de la Maladie, et l'autre compère Désespoir n'était pas venue. Tant mieux. Par contre, sa chemise allait être sacrément fripée.
Et me revoilà sur le chemin du retour. Au revoir, univers rempli d'étoiles. Je baissais la tête, comme pour me détourner des astres, là-bas, fixant maintenant mes chaussettes. Pourquoi les autres parlaient-ils toujours ? Ne peuvent-ils pas apprécier le silence à sa propre valeur ? D'autant plus si ce n'est pour rien dire. Il s'était rendu compte par lui-même la bêtise qu'il venait de dire, c'était déjà ça. Cependant, je peux y aller, moi. Il faudra que je songe a y emporter un télescope, une fois, d'ailleurs. Je soupirais, parce que malgré tout, ce n'était même pas sûr que j'ai le droit d'y aller. Logiquement, je ne suis pas enfermé ici car -malgré moi- je suis un des surveillants de cette prison, mais en même temps, un détenu à mon tour. Par quoi ? Tant de chose ... Mes pairs, certes, mais aussi mes propres sentiments. Comment pourrai-je arriver à me tromper moi-même ? Je veux partir. Tout en ne le voulant pas. Pourquoi était-ce si compliqué ? Je remontais mes yeux vers l'autre, son fauteuil et son étrange position. Il voulait se sentir en sécurité, comme dans le ventre de sa mère ; s'il savait seulement où il avait mis les pieds ! Que les autres s'amuseront de cet homme, rien qu'à le voir je le savais futur jouet d'un de mes frères et soeurs, quoi que je ne sache pas encore duquel. Pauvre Henri, ce que tu fais en ce moment ne fera qu'accentuer tes futures souffrances. Les Vices n'aiment pas qu'un des leurs s'attache à un pauvre humain, encore moins s'il est normal. Un psychopathe, ça passe, des fous aussi, les personnes qui font du mal également. J'ai déjà eu du mal à protéger Todd, à vrai dire ç'aurait été impossible si le doudou de Paige n'avait pas été sa future fiancée. Frances, celle que je haïssais tant. Bien évidement, il y a un gouffre entre Henri et mon cher malade, mais c'est suffisant pour que Caïn s'intéresse à lui, comme tous les autres, et le manipule pour me pousser à bout. Mais. Mais. Mais ... mon stupide cerveau n'en a rien à faire, égoïste comme il est. Je veux continuer, même si je déteste qu'on me prenne en pitié, qu'on prenne un peu soin de moi. Alors que je ne le mérite aucunement ... Je veux lui apprendre à rêver, correctement, à partir loin de ses futurs douleurs.

    Pourquoi avoir besoin de les voir ? Il suffit de se les imaginer.
Pour illustrer mes propos, je fermais les yeux tout en levant le visage, droit vers le plafond. Ce n'était pas ça que je visais, mais le ciel au-delà, et c'était tout comme si je voyais déjà quelques scintillements s'installer sur ma vue noire. Restait à savoir s'il avait une assez grande ouverture d'esprit pour me suivre.
Henri Potier

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Henri Potier



La réponse du jeune homme l'avait légèrement surpris. Voir à travers le mur? Imaginer? Il en comprenait le fondement, l'idée, mais il ne pouvait, malheureusement, y adhérer. D'une part parce qu'il n'en avait nullement l'envie, et d'une autre parce que son imagination n'était pas assez opérationnelle pour. Avec onze heures de sommeil derrière lui, une mine radieuse et le ventre bien plein, peut être, mais pas maintenant, alors que sa dernière rencontre avec son lit datait d'avant-hier, et avec ces quelques rencontres avec des objets potentiellement contondants.

Et il y avait aussi que, sur un plan idéologique, il ne pouvait s'y résoudre, même si, sur un point de vue purement sociologique, c'était une excellente idée à appliquer en milieu carcéral ou situation de crise. Sauf que le français n'en volait pas de ces fantasmes d'étoiles, de ces rêves d'objets inatteignables. Il voulait être sous le ciel pour les voir, sentir le vent fouetter son visage, les odeurs de la nuit ravir ses narines, la fraîcheur du soir et la caresse de la bise lui arracher des frissons. Peut être est-ce égoïste et sensuel comme manière de voir, mais il n'en a strictement rien à faire. Il est comme il est, et il aime le monde quand il peut le sentir directement, pas uniquement le rêver et rester passif de son propre corps.

Mais puisque c'était le choix de James, il le laissa faire, se contentant de le le détailler pendant sa quête stellaire. Quand on y regardait bien, on pouvait le dire assez beau... A moins que ce ne soit l'absence d'éclairage vif qui donne cet effet, ce qui était souvent le cas, mais il n'y pensait pas réellement pour le cas présent. Et puis c'est bien plus agréable de se dire qu'il est beau, et pas simplement mythifié par les ombres. Est-ce excessivement surprenant de dire d'un coureur de jupons qu'il est un esthète? Allez savoir, de son point de vue ce n'est pas une immense hérésie.

A force de le regarder, savourer le silence, et surtout ne pas bouger, voilà que Morphée le prit par surprise. C'était l'une des raisons pour lesquelles il tentait depuis tout à l'heure de ne pas laisser s'installer le silence. Henri a toujours eu la chance de ne pas être long à s'endormir. Du genre à s'endormir au milieu de ses phrases parfois. On peut appeler cela de la demi narcolepsie qu'on ne serait pas loin du tout de la réalité. Mais pour sa part, il se contentait de savourer ces minutes de sommeil récupérées sans le moindre effort. Comme les enfants, il lui fallait neuf heures de sommeil pour être en forme, et il était courant qu'il les prenne. Malheur à celui ou celle qui l'en priverait. Outre la tentative de meurtre immédiate au réveil, on aurait alors un être humain qui n'en est que l'ombre, terne, dormant debout, incapable d'articuler trois pensées cohérentes, et n'essayons même pas de parler des paroles. Et puis avec tout cela, il y a, évidemment, l'agressivité décuplée et déclenchée selon des facteurs purement aléatoires.

Sans doute est-ce parce qu'on parlait d'étoiles jusque là qu'il rêva qu'il marchait parmi eux, sautant de nébuleuse en planète, de géante rouge aux supernovas, mais en évitant les trous noirs, plutôt agressifs et pour le moins délétères. D'ailleurs, c'est quand il mit le pied dans l'un d'eux qu'il se réveilla en sursaut, peut être aussi avec la sensation de chute provoquée par son pied ayant glissé du fauteuil et fait bouger le corps jusque là emprisonné dans une bienheureuse et douillette immobilité.

Perdu, il avait regardé autour de lui. Dieu ce que c'est désagréable de se réveiller... Parfois on frôle même la douleur physique. Non, ce n'est pas humain. Ca fait mal, tout le corps est engourdi et ne semble que demander le sommeil à nouveau, les bribes de rêves s'accrochent encore à notre conscience, et ainsi on est perdu entre deux mondes, l'un gourd et moelleux comme du coton ne demandant qu'à vous submerger, l'autre dur comme la justice et si froid, si laid...
Il passa une main dans ses cheveux, et secoua la tête. Il voulait se rendormir, se perdre dans ces étoiles qui lui étaient offertes... Mais pas ici, pas avec quelqu'un à côté, et pas roulé en boule dans un fauteuil inconfortable. Il ne voulait pas se réveiller perclus de douleur ensuite. A contre coeur il s'étira, et tenta de voir où était James. Ah ben oui, on est réveillé ou on ne l'est pas.

- Je me suis endormi je crois... que je vais retourner à ma chambre...

Partit pour le faire, voilà qu'il s'était levé, et avait d'ailleurs vacillé bien comme il faut. L'équillibre est une notion tout à fait relative, parfois incongrue selon la situation.

- Je vous souhaite une bonne matinée... Et soignez vous bien.

Il tenta vaguement un petit sourire qui se solda par un nouveau baîllement, captura le premier livre passant à portée de main pour profiter d'un peu de lecture plus tard, puis quitta la pièce en direction d'une autre plus équipée pour ses desseins.
James Leighton

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James Leighton



[La narration du premier paragraphe est étrange, mais c'est parti tout seul alors la flemme de changer ^^']


    Allons, James, déçu une fois de plus, et alors ?
Ça ne fait qu'une unité en plus, sur ce nombre que tu ne compte même plus. Tu aurai mieux fait de te perdre définitivement dans les étoiles, stupide Maladie. Mieux, tu n'aurai jamais dû exister, ne jamais t'accrocher au simple espoir qu'était le fait d'être récupérable. Quand arrêteras-tu de te borner à ignorer ? Ils te l'ont déjà dit, pourtant, ils ont raison et tu le sais. Alors, pourquoi se bercer d'illusions ? Ah, je sais : parce que tu y crois encore, pauvre petit gamin naïf. Mais ne continuons pas sur ce sujet, après tout, tu sais déjà tout dessus. Contentes-toi de rêver, comme tu sais si bien le faire, envoles-toi donc vers ses lumières que tu n’aperçois pourtant pas, et oublie. Certains plonge dans l'alcool, d'autres dans la drogue, mais toi, non, de toutes manières ça t'est interdit. Même les médicaments te font du mal, comme si rien ne pourra jamais te guérir, mais tu étais déjà au courant, non ? Quand on y pense, c'est compréhensible, que tu te borne à penser à autre chose, à t'évader de se monde-ci pour aller dans un où tu sera bien. Cependant, jusqu'à quand cela durera-t-il ? Oui, pessimiste, mais terre-à-terre, au moins, parce que même si tu renie à nouveau, chaque chose a une fin. Si cela veut dire que tu en as une aussi ? Je n'en sais rien, honnêtement. Selon le point de vue, on peut dire que tu meurs chaque jour dans les humains, que ce soit avec eux ou tout seul.
Oh, mais tu n'en a pas assez, de toujours réfléchir, toi ? Je ne savais même pas à qui je m'adressais, c'était juste dans ma tête, le genre de phrases qu'on se dit à soi-même, résonnantes et claires en même temps. Mais aujourd'hui n'était pas le bon jour pour penser, j'en avais assez, c'était exactement ça. Parce que même avant que je ne parte, je savais que j'allais rester seul, mais tant pis. Je devrai pourtant savoir à force que les plus beaux voyages se font avec son ego, à tout simplement imaginer. Alors je ferme les yeux en même temps que le français et chacun s'envole pour une destination différente, propre à nous seuls. J'ai vu dans le ciel les sombres lueurs nacrées de la Voie Lactée, le claires lumières de Persée et du Cocher, j'ai volé jusqu'à elles pour pouvoir encore mieux les admirer, les observer, alors qu'elles restèrent dans leur mutisme, toujours aussi immobile. Les étoiles avaient été là depuis le début, tout comme nous neufs, mais elles trônaient comme des reines au-dessus de nous tous, surveillant du coin de l'oeil la planète remplie d'eau qu'était la Terre. De temps en temps survenait une visite, une étoile filante tombée, comme déchue pour telle raison, sans qu'on en sache d'avantage. Peu importe, ça permet de penser, d’imaginer ...
    - Je me suis endormi je crois... que je vais retourner à ma chambre...
Mes yeux s'ouvrir d'eux-mêmes, rapidement, pour le regarder. Moi non plus, je n'étais pas totalement ici, ni complètement ailleurs, juste entre les deux, assez pour l'entendre mais trop loin pour comprendre. Je l'observais s'en aller de mon regard vide, et une scène revînt à ma mémoire, tandis que la voix revenait. Parti. Tu t'en souviens, James ? Vas-t'en ! Je ne veux pas t'entendre, pas t'écouter ! Le mur dans mon dos me fait mal, je m'appuie trop dessus, mais je ne veux pas de nouveau entendre ces chuchotement, sentir sa présence malsaine au creux de mon oreille. De ma main libre, je me masse la tempe avant de me relever, tremblant. Me soigner. La blague de mauvais goût. Longeant les murs et m'aidant d'eux pour retourner dans ma chambre, les deux livres sous le bras, j'avais eu du mal à monter les escaliers ; de la fièvre ? Je n'en sais rien et ne veux rien savoir. Pas maintenant, plus tard. Le sol bouge sous mes pieds, tout semble vouloir danser autour de moi, mais les étoiles, elles, restent fixes, comme le repère qu'elles ont toujours été. Enfin, enfin j'arrive devant ma porte que je referme aussi vite que je suis rentré, m'adossant contre elle et me permettant enfin de respirer plus calmement. Passons aux choses plus sérieuses, maintenant, ma main libre sur mon avant-bras, tandis que le coude était coincé par le bois blanc de la porte. Un coup, un seul petit coup sec, un craquement clair et net, un cri qui tentait d'être étouffé tout aussi net. Ça allait mieux, un peu.
Mais je devrai lui rendre sa chemise.

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La république des silences [James]