Au commencement il n’y avait rien. Puis Dieu créa le monde. De Son souffle il sépara Lumière et Ténèbres, ainsi naquirent le « jour » et la « nuit ». Puis il donna naissance au ciel, qui deviendrait Sa demeure, vint ensuite la « terre » et ses fruits. Ensuite …
Oui c’est bon, tout le monde la connait cette histoire. Le Barbu créa les animaux et ensuite il façonna l’Homme à Son image. Le premier du genre, Adam de son prénom, resté célèbre dans l’Histoire pour sa tenue très légère, à qui il donna pour compagne Eve. Ah Eve, cette chère Eve, ma préférée. Nous reviendrons à son sort plus tard, ce qui nous intéresse pour l’instant c’est l’autre côté de l’Histoire. Pendant des siècles la vermine grouillante du Très-Haut se multiplia, pullula, des nuisibles impossible à éradiquer qui par bonheur trouvèrent judicieux se s’autodétruire. Comme quoi, on peut dire ce que l’on veut, le Seigneur devait bien avoir un petit problème à l’étage pour créer pareille nuisance (elles sont bien à Son image non ?), si vous voyez ce que je veux dire. Quoiqu’il en soit la parfaite Création Divine ne garda pas bien longtemps les faveurs du padre. Je pris grand soin de la faire renvoyer de l’Eden à grand coup de pied aux fesses. Pour couronner le tout, une guerre intestine détruisit les rang du Paradis au moment où le Barbu ordonna à Ses anges de vouer allégeance à Son imperfection. On connait la suite, les anges rebelles menés par Lucifer se firent jeter aux Enfers, certains y troquèrent leurs ailes contre des cornes, d’autres … mieux vaut ne pas le savoir.
Et pendant ce temps sur Terre, le bel Adam grelotant jugea bon d’enfiler un pagne, et reprocha à sa tendre toute l’horreur de leur situation. Ce fut le début d’une longue stigmatisation de la femme, de l’abrutissement de son mâle, de la fin de l’harmonie dans les couples. Bel héritage d’Adam et Eve à leurs enfants, les Hommes avec un grand H. Par la suite, des maux de toutes sortes accablèrent les héritiers des deux premiers du genre. Incapables de trouver des solutions à leurs problèmes, les doux agneaux s’en retournèrent à leur Père, priant, pleurant, geignant qu’on leur envoi un remède miracle. Jamais leurs prièrent ne trouvèrent écho aux Saintes oreilles, et ce pour une raison très simple. Contrairement aux idées reçues, le Très-Haut ne se fichait pas du sort de Sa création (quoique), cependant il avait lui-même quelques problèmes épineux au Paradis. Il faut bien dire qu’ils ne sont pas très compétent là-haut non plus, déjà à l’époque l’administration se montrait défaillante. Quand c’est tout un monde à administrer, je ne vous dis pas la galère ! On a la même aux Enfers.

Que je vous explique la chose. Dieu, très occupé à gérer Son Paradis, décida d’envoyer Ses anges maintenir l’ordre sur Terre. Entendre par là : nous trancher la tête, nous autres humbles Démons. Du côté infernale, Lucifer ou Lulu de son petit surnom, nous envoyait gentiment répandre désolation et corruption chez les Hommes. Je l’avoue non sans fierté, les maux de la Terre, c’est nous. Enfin presque tous. Car le plus grand de tous les Maux de la Création est l’Homme, sans conteste. Nos petites confrontations journalières se traduisirent chez les humains comme cet éternel combat du Bien contre le Mal, remanier à toutes les sauces et présent dans toutes les œuvres d’arts jusqu’aux Disney.
Le monde aurait pu continuer à tourner ainsi si seulement la Divine Création n’avait pas pété les plombs (quand je vous le dis que ça ne va pas dans l’esprit du Barbu). Les siècles passant, Anges comme Démons purent admirer depuis leurs terres respectives la déchéance de l’Humanité. Chacun de ces êtres portait désormais en lui l’essence même de la Violence le poussant toujours plus loin dans l’atrocité de ses actes. Viols, meurtres, tortures, barbarie, prostitution, guerre, pédophilie, perversions, provocations, le Mal n’avait plus besoin de nous puisqu’il se répandait à présent dans les veines de ces fragiles marionnettes. L’aboutissement de toute une vie pour un Démon qui se respecte, voir son Pêché vaincre la Vertu lui étant opposée. Seulement voilà, à quoi servions nous maintenant que l’Homme corrompu jusqu’à l’os prenait plaisir à s’arracher la Vie, un grand sourire aux lèvres ? Certes il y avaient encore les Anges pour nous divertir, mais plus pour longtemps hélas. Après des siècles et des siècles de bataille, l’heure du bilan sonnait, et il était bien loin d’être réjouissant. A cause de cette humanité désolée, les deux camps souffraient de l’absence de nouvelles recrues. Trop peu d’âmes appelées à s’élever au rang d’Ange, trop peu de damnés capables d’autre chose que de brûler pour l’éternité dans un fleuve de lave. Sans compter l’émergence des sciences et autres religions tuant le christianisme, adieu nos chers croyants, bonjours nouvelles « divinités ». Personnellement je ne me vois pas du tout engager la conversation avec un Dieu à tête de vache, mais il parait que c’est très tendance en Inde. Le temps de la guerre révolu devait désormais laisser place à une trêve.

Une paix entre Anges et Démons, entre Dieu et Lucifer, pas pour le bien de l’humanité mais pour notre bien à nous. Du jamais vu. Improbable, incroyable, irréalisable. Et pourtant, bien que non présent à la conclusion de cette trêve, elle eut lieu. Pas de combats, pas de coups bas, aucune agression pendant mille ans. Un millénaire de paix, à attendre que l’Enfer comme le Paradis se renfloue, à contempler l’Homme se précipiter vers sa fin ou au contraire redresser la barre. Aucun n’ayant confiance en l’autre, on se mit d’accord sur les conditions à respecter, mais surtout on procéda à du jamais vu : un échange d’otages. Perséphone et Lilith se portèrent garantes sans le vouloir, de la bonne conduites des infernaux. Quand au Paradis, il offrit à Lucifer l’un de ses archanges, Gabriel, dernier né et favoris de Dieu. Un choix loin d’être irréfléchi, tout le monde sachant très bien quel lien unissant le Saint et le Roi des Menteurs. La porte ouverte à une immondice à mon sens, mais surtout une affaire de vengeance suite à cette célèbre affaire de l’Anneau de Lucifer, qui fait encore bien rire aux Enfers.

Depuis lors, plus aucun conflit entre les deux camps n’éclata sur Terre. La paix semble donc s’être installée pour mille ans. En apparence seulement, car au Paradis comme aux Enfers, chacun y va de sa petite affaire pour préparer le retour des hostilités. Le tout ponctués par les cris des deux démones prisonnières d’un harem d’eunuques, et des cris agaçant de Gabriel prisonnier de l’étreinte de Lucifer. [/i]